Monsieur le Ministre, le Regroupement des organismes ESPACE du Québec (ROEQ) salue votre annonce concernant la mise à jour du Plan d’action concerté pour prévenir et contrer l’intimidation et la cyberintimidation 2020-2025. Cependant, notre Regroupement souhaite exprimer quelques réticences. En effet, pour le bien-être de tous les enfants du Québec, il est nécessaire et prioritaire que le gouvernement arrime l’ensemble de ses plans d’action et pose des actions concrètes pour l’exécution de ceux-ci.
Pour rappeler les faits, il est important de souligner que ce plan se veut une mise à jour de la loi 56 sur la violence et l’intimidation à l’école, adoptée en 2012 et ayant passablement les mêmes objectifs. Cependant, ce plan manque définitivement de détails sur la façon dont il sera appliqué. À titre d’exemple, le plan propose un ajout de sept heures de cours au primaire et au secondaire chaque année pour parler de prévention de la violence. Dans un contexte où le personnel enseignant et de soutien est largement insuffisant et que celui-ci n’a toujours pas reçu le soutien nécessaire pour, entre autres, enseigner les notions des cours d’éducation à la sexualité, est-ce réellement la meilleure avenue pour faire de la prévention?
Monsieur le Ministre, vous savez que le personnel enseignant et de soutien est à bout de souffle et la solution proposée est de leur ajouter une charge de travail supplémentaire? Pour parler de la prévention de la violence, pour l’enseigner et surtout pour être en mesure d’offrir un filet de sécurité aux enfants qui font des dévoilements, une expertise est essentielle. Les organismes communautaires en prévention de la violence faite aux enfants, collaborent notamment avec les établissements scolaires et sont des interlocuteurs à privilégier et à interpeller pour soutenir le milieu de l’éducation. Connaissez-vous ces ressources Monsieur Drainville? Force est de constater que vous avez manqué une autre occasion de travailler avec les personnes du terrain qui détiennent l’expertise nécessaire pour mener à bien ce plan d’action.
Lors d’une prise de parole publique, vous avez mentionné que la prévention de la violence passe également par les parents. Le ROEQ et ses membres sont tout à fait d’accord avec ces propos. Par contre, qui s’occupera de sensibiliser et d’informer les parents sur les meilleures pratiques en termes de prévention? Qui les outillera afin qu’ils puissent être à l’aise d’aborder ces sujets auprès de leurs enfants ou pour réagir en cas de violence? Les parents et le système d’éducation sont déjà sous pression et il serait vraiment temps que le gouvernement québécois reconnaisse l’expertise et l’apport des organismes communautaires autonomes. Cela peut prendre forme en faisant appel à leurs connaissances, en les soutenant financièrement, à la hauteur de leurs besoins et en les incluant dans les réflexions et l’analyse entourant la mise sur pied de ce type de plan d’action. Le gouvernement du Québec ne peut pas se priver de l’expertise des partenaires de la communauté; des professionnels formés et détenant l’expérience terrain.
En conclusion, le ROEQ est d’avis que ce n’est pas en annonçant en grande pompe la mise en place d’un Plan de prévention de la violence et l’intimidation dans les écoles 2023-2028 et une enveloppe budgétaire de 30 millions, probablement insuffisante et dont les critères ne sont pas clairement définis, que les enjeux de violence et d’intimidation, présents dans la société et dans les établissements scolaires disparaîtront. Une vision d’un Québec où les enfants sont la priorité, où le milieu d’enseignement est sécuritaire et exempt de violences et d’intimidation est plus que nécessaire. La solution à ces enjeux ne peut pas reposer uniquement sur les épaules des professionnel.le.s scolaires, mais sur l’ensemble de la communauté. Utilisons les bons moyens et l’expertise existante pour outiller les enfants, les parents, la famille élargie et la population afin que ces personnes puissent devenir des agents multiplicateurs en prévention de toutes les formes de violence. Travaillons ensemble afin de permettre aux enfants de vivre une enfance en sécurité et sans violence.
Janie Bergeron
Coordonnatrice du Regroupement des organismes ESPACE du Québec
www.espacesansviolence.org